Le harcèlement scolaire : « En parler, ça a changé ma vie »

Le 4 janvier 2019
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Arrivée de Madagascar pour faire ma classe de troisième à Mayotte, je me suis battue contre le harcèlement de certaines de mes « camarades » de classe.

Mon harcèlement a commencé depuis mon arrivée au collège. Je venais d’arriver à Mayotte et je ne savais pas la définition du harcèlement. Il se définit comme une violence répétée, qui peut être verbale, physique ou psychologique. Cette violence se retrouve aussi au sein de l’école. Elle est le fait d’un ou de plusieurs élèves à l’encontre d’une victime qui ne peut se défendre. Le mien a commencé par des blagues entre copines.

C’est ce que je pensais. Elles m’appelaient  la « malgachienne », elles me poussaient et me tiraient les cheveux. J’ai rien fait. Je me suis laissé faire au début. Je voulais en parler mais j’avais peur, car elles me menaçaient. Elles me disaient « Personne va te croire, tu es une +malgachienne+. Vous les Malgaches vous êtes des putes, des menteuses. »  J’essayais d’en parler au surveillant, mais il m’a dit que c’était des jeux d’enfants.

Alors, elles ont continué à me harceler. Un jour, je ne pouvais plus me laisser abattre car je savais que je n’étais pas la seule fille au collège qu’elles harcelaient. Elles ont dit que ma copine était une « crétin ». Elles harcelaient toutes les Malgaches et les chrétiens car elles sont musulmanes et elles se croient parfaites. Alors quand un de leur groupe a dit que j’étais une « malgachienne » et ma copine une « crétin », j’ai répondu : « En quoi c’est vos affaires ? » Et je me suis même battue à cause de ca.

Ensuite, je l’ai dit à mon père. Il a dit qu’il allait le dire à la principale. Il m’a dit aussi qu’il fallait en parler aux professeurs, « sinon ça va empirer ». Mais je lui ai dit que j’allais le faire toute seule. Je ne voulais pas qu’on me traite de pleurnicheuse alors je l’ai moi-même dit à notre professeur principal.

Il m’a dit : « Si elles continuent, tu me le dis et je les amènerai chez la principale et elles auront des heures de colle. » Maintenant, elles me harcèlent toujours, mais pas pire qu’avant. J’avais cru qu’en parler allait empirer ma situation, mais au contraire, ça a changé ma vie au collège… Alors j’ai un conseil pour les élèves harcelés : il faut en parler au surveillant. S’il ne vous écoute pas, parlez à vos parents, car rester dans la peur, ça ne résout rien.

Aujourd’hui, on estime que 200 millions d’enfants et d’adolescents sont victimes de harcèlement lié au physique, à la religion, au handicap ou au sexe, en France. Si vous n’en parlez pas, ça va empirer. Essayez d’en parler,  ça vous aiderait.  Si vous avez besoin de conseils complémentaires, contactez le numéro vert « Non au harcèlement » au 30.20, ouvert du lundi au vendredi de 9h à 20h, et le samedi de 9h à 18h (sauf les jours fériés). Si le harcèlement a lieu sur Internet : contactez le numéro vert  « Net écoute » au 0800.200.000. Il est gratuit, anonyme, confidentiel et ouvert du lundi au vendredi, de 9h à 19h.


Ranhia, 14 ans, 3ème 8 au collège K2

 

Harcèlement : que dit la loi ?

Le harcèlement à l’école implique notamment le droit scolaire. Mais, le harcèlement est aussi un délit. En tant que tel, il tombe donc sous le coup de la loi pénale. Brève synthèse des mesures légales prévues dans ce domaine.

Au niveau pénal

Le code pénal, en son article 442 bis, prévoit une peine d’emprisonnement ou une amende pour « quiconque aura harcelé une personne alors qu’il savait qu’il affectait gravement par ce comportement la tranquillité de la personne visée ». Pareil mesure touche les individus majeurs. Quid pour les mineurs ?

Au niveau du tribunal de la jeunesse

Pour un mineur, certaines sanctions  peuvent être décidées par le Tribunal de la Jeunesse afin de lui faire comprendre la gravité des actes commis et de le responsabiliser par rapport à ceux-ci. Exemples de sanctions : des travaux d’intérêt général, une réparation des dommages par proposition du jeune, etc.

Au niveau de l’éducation et du droit scolaire

L’article 8 du décret « Missions » du 24/7/1997, précise la responsabilité des écoles quant à la violence au sein de celles-ci : « chaque établissement éduque au respect des convictions de chacun, au devoir de proscrire la violence tant morale que physique […] et de mettre en place des pratiques démocratiques de citoyenneté responsable au sein de l’école ». Le décret anti-discrimination du 12/12/2008, spécifie quant à lui que « compte-tenu de sa mission et de sa capacité à agir, l’intervenant (dans l’éducation, la guidance psycho-médicosociale, l’encadrement,…) est tenu d’apporter aide et protection à l’enfant victime de maltraitance ou à celui chez qui sont suspectés de tels mauvais traitements ». Depuis 2008, un arrêté du Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles fixe que « tous les règlements d’ordre intérieur doivent désormais mentionner clairement les sanctions et les mesures prévues à l’encontre de faits de violences tels que les coups et blessures, le racket, les actes de violence sexuelle et le fait d’exercer sciemment et de manière répétée sur un autre élève une pression psychologique insupportable, par menaces, insultes, injures, calomnies ou diffamation ».

Si en théorie les victimes semblent bien protégées par la loi, dans les faits la situation est plus compliquée. Les procédures sont souvent longues mais surtout difficilement accessibles à un jeune en détresse relationnelle. En effet, seulement 5 à 15% des victimes osent en parler à un adulte, par peur des représailles, par honte ou par manque d’informations.

Le CEF et Infor Jeunes Laeken

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